In memoriam

René DUDAN

René DUDAN

1919-2009

 

René Dudan allait avoir 90 ans quand il nous a quittés.

Né en Suisse en 1919, après des études secondaires au lycée de Vevey, et après avoir songé un temps au journalisme, il a obtenu en 1942 le diplôme d’Ingénieur Géologue de l’Institut Géologique de l’Université de Lausanne ; il a également suivi les cours de l’Ecole d’Ingénieurs de Lausanne (devenue depuis Ecole Polytechnique Supérieure de Lausanne).

Immédiatement après, et n’étant pas soumis en Suisse à l’obligation du service militaire, René Dudan s’est engagé dans la vie professionnelle qu’il a consacrée toute entière aux ressources du sous-sol, pétrolières, puis minérales.

Il débute en Algérie, au service du Gouvernement Général de l’Algérie, où il œuvre surtout dans le domaine minier, aussi dans le domaine pétrolier, en participant à des opérations préparatoires à la mise en place du BRMA (Bureau de Recherches Minières de l’Algérie) et de la SNREPAL (Société Nationale de Recherches et d’Exploitation de Pétrole en Algérie).

En 1946, il arrive en France, où il est employé par la SNPLM (Société Nationale des Pétroles du Languedoc Méditerranéen) ; il y est responsable du secteur Ouest Languedoc –Roussillon – Montagne Noire, et effectue par ailleurs des missions pour le compte du BRP (Bureau de Recherches de Pétrole) ou de la Société des Mines de Malvési (soufre).

En 1953, il quitte le domaine du pétrole et s’oriente vers le secteur minier auquel il consacrera toute la suite de sa carrière.
Il rejoint le BUMIFOM (Bureau Minier de la France d’Outre Mer).
Pendant deux ans, il est affecté au siège et effectue diverses missions en Afrique, notamment sur des indices (qui deviendront des gisements) de fer en Mauritanie (exploité plus tard, et encore aujourd’hui, par Miferma) et au Gabon (Mékambo).

Il passe ensuite sept années à Madagascar (de 1955 à 1962), où il contribue activement, en tant que Chef Géologue, au développement d’une activité importante et diversifiée de recherches minières.

En 1962, il rejoint la France, au siège du BRGM, qui en 1959 a pris la suite du BUMIFOM et des autres Bureaux Miniers.
Il y exerce plusieurs fonctions : auprès du Secrétaire Général , auprès du Directeur Général en tant que Chargé de mission « Programmes » (c’est là que je commence à faire sa connaissance), puis au département des Affaires Extérieures, où il participe, avec l’enthousiasme, l’énergie et le sérieux qui le caractérisaient, à la grande aventure du développement des activités du BRGM hors de ses zones traditionnelles d’intervention ; c’est ainsi qu’il mène des opérations de prospection technico-commerciale débouchant sur des implantations du BRGM en Libye, en Turquie et surtout en Arabie Séoudite ; dans ce dernier pays, totalement nouveau pour René Dudan, et aussi pour le BRGM, par la langue, les traditions, le mode de vie, il effectue avec succès en 1964 une mission de quelques semaines qui aboutit à la sélection de trois zones d’intervention pour une action de recherche minière multi-substances, puis à la négociation et à la signature d’un contrat qui sera prorogé pendant plus de vingt cinq ans ; l’Arabie Séoudite représentera pendant cette période la plus importante implantation du BRGM à l’étranger.

En 1970, René Dudan devient chef du Département Asie-Océanie-Amériques ; il y assure le contrôle technique, administratif et financier des nombreuses opérations développées par le BRGM dans ce vaste secteur du monde ; il négocie des contrats dans plusieurs pays, par exemple Inde, Iran, Laos, Cambodge.

Puis, en 1973, il change complètement d’orientation et devient, à sa demande, Directeur du BRGM au Brésil ; il y est responsable de la gestion des opérations de recherches, minières (notamment diamant) et autres dans ce grand pays et il contribue à y consolider les positions du BRGM. Il y passera sept années, dont les premières auront été très heureuses pour lui et son épouse Geneviève ; malheureusement, la maladie frappe et emporte Geneviève au cours de ce séjour, et il ne parvient pas à exaucer le vœu de son épouse, qui aurait été de retourner à Rio après un lourd traitement à Paris.

Abattu par cette disparition, il ne renonce pas, mais repart pour une nouvelle aventure professionnelle, dans une direction différente ; en effet, il répond positivement à la proposition du Directeur Général du BRGM, de prendre la direction d’une toute nouvelle filiale créée avec l’Etat du Koweit. Il organise cette société dotée de moyens financiers significatifs, il étudie pour elle des opportunités d’investissement dans la recherche ou l’exploitation minière en France, Turquie, etc.

Et c’est en 1986 qu’il part en retraite, après quarante quatre années d’une activité intense.

Mais au-delà de cette activité professionnelle bien connue de ses collègues, René Dudan avait aussi une vie personnelle et familiale sur laquelle il était extrêmement discret ; c’est en Algérie qu’il avait rencontré Geneviève qui sera son épouse pendant plus de trente ans avant d’être emportée par la maladie.
Entre temps, la famille aura eu, en février 1949, un grave accident de voiture, qui laissera Geneviève lourdement handicapée, et qui frappera durement leur fille Elisabeth (Babette), alors âgée de vingt deux mois, qu’ils entoureront toute leur vie de beaucoup d’affection.
Le dévouement dont René Dudan faisait preuve à l’égard de Geneviève était remarquable ; il n’était pas rare de le voir porter son épouse pour lui éviter un passage ou une montée d’escalier difficile pour elle.
Malgré les problèmes de santé liés à l’accident, Elisabeth a fait des études poussées ; au lieu de la voie scientifique qu’aurait souhaitée son Père, elle s’est orientée vers la psychologie, elle a fait de la recherche à l’INSERM et a travaillé dans les hôpitaux.
René Dudan et son épouse ont eu aussi un fils, Jacques, né en 1946, que son Père aurait aimé voir embrasser une carrière scientifique, « mais qui n’a fait que HEC », excusez du peu ! et finalement, même s’il ne le disait pas souvent, René Dudan était très fier du beau parcours professionnel qu’ont réalisé ses enfants.

René Dudan ne laissait pas indifférent, car il avait une personnalité à la fois forte et attachante ; il était travailleur, précis, voire méticuleux ; il était exigeant aussi bien vis-à-vis de lui-même que vis-à-vis des autres ; il ne supportait pas l’amateurisme ou le dilettantisme et il le faisait savoir avec force, ce qui contribuait à renforcer encore sa réputation d’homme rigoureux.

C’était un collaborateur de très grande qualité, auprès duquel on se félicitait régulièrement d’avoir placé sa confiance.

Mais René Dudan avait aussi une grande culture dont il ne faisait pas état ; dans sa jeunesse et avant de s’intéresser à la géologie, il avait fait de la musique, constitué un orchestre de jazz, joué du violon et de la guitare. Il s’intéressait, à l’art, à la poésie, et jusqu’à la fin de sa vie, il a continué à voyager.

La dernière étape de sa vie aura été égayée par la présence d’une nouvelle compagne, Marie, qu’il épousera dix huit mois avant son décès.

Enfin, René Dudan, né de nationalité suisse, et après être devenu français de cœur, avait acquis la nationalité française en 1964 ; il fut promu chevalier de l’Ordre National du Mérite en 1980.

Jean LESPINE


René DUDAN est décédé le 23 octobre 2009.


Laisser un commentaire